08 June 2016
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Virginie Rebetez (1979) est une photographe suisse qui vit et travaille à Lausanne. Son travail sur Suzanne Gloria Lyall, disparue le 2 mars 1998 à Albany, dans l’Etat de New York, à l’âge de 19 ans a été réalisé en 2014-2015 lors d’une résidence d’artiste à New York organisée par Le Canton de Vaud. “Out of the blue” est un projet conceptuel qui part d’une base documentaire – la disparition de la jeune américaine – pour s’élargir ensuite sur des questionnements plus vastes autour de l’identité et du médium photographique en lui-même. Il tend également à interroger notre rapport à la mort et à l’absence ainsi que le besoin de l’être humain d’un contact physique, d’un relation à la matière dans son processus de croyance et de deuil.
Ce travail se base sur une collection d’informations (archives, photographies, correspondances, objets personnels, images policières) ayant pour seul but de découvrir Suzanne. Les images jouent sur le visible et le hors-champ, le recto et le verso, l’image-document et l’image-objet.
Le livre peut se lire comme une sorte de nouveau dossier de l’enquête, où l’image photographique atteignant ses limites, la recherche du tangible et de la matérialité est au cœur de l’enquête.
Ce puzzle visuel, avec ses cavités apparentes, ouvre le champ à de nouvelles interprétations, de nouveaux indices, de nouveaux personnages, ainsi qu’un nouveau visage à Suzanne: ce dernier n’est jamais clairement montré, l’adolescente semble vivre en dehors du cadre, entre les plis du livre, dans un monde invisible. Le seul portrait d’elle, où elle est réellement montrée, est présent dans le travail: le “age-progressed composite”, réalisé par un artiste-scientifique – de l’anglais “forensic” – montrant sa possible apparence en 2015, à l’âge de 37 ans.
“Out of the blue” offre une lecture complexe, à plusieurs niveaux tant documentaire que conceptuel et philosophique, posant divers questionnements sur le médium photographique et la communication entre ses différents rôles, formes et usages.
De quelle manière la notion d’UTOPIE est elle présente dans ta pratique, approche et/ou stratégie artistique?
L’Utopie, dans sa notion de territoire existant mais non matériel, est quelque chose de très présent dans mes projets photographiques. Les personnages évoqués dans ceux-ci sont très souvent invisibles, ont perdu leur identité ou ont disparus dans des conditions obscures; des sortes de dossiers non-classés. Ce qui m’intéresse est d’intervenir dans cette zone grise où la matière est absente, où les personnages naviguent entre le vivant et le plus, où les choses ont perdu leur statut initial et d’y donner de la consistance, en y apportant à nouveau une forme, un contour et une identité.
L’Utopie se comprend parfois comme la construction mentale d’un système ou d’un modèle idéal de société civile. Comment perçois-tu le rôle de la pratique créative dans ce contexte? Ou, dit d’une autre manière, penses-tu que le design peut changer la société?
Les designers et artistes sont les observateurs de leur société et proposent donc une réflexion sur ce qui les entoure. Ils sont donc très clairement des acteurs du changement d’une société. Une société dépourvue d’art est une société stérile, non-évolutive car non-réflective.
Où puises-tu ton inspiration? Ton travail et/ou ton état d’esprit sont-ils guidés par des références particulières?
Beaucoup de choses peuvent me faire démarrer un projet. Un fait divers dans un quotidien, un essai scientifique ou anthropologique, une rencontre, un sitcom américain, une croyance populaire….
Plus sur Virginie Rebetez ici.
