02 June 2016
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Sensible aux enjeux environnementaux et sociaux actuels, Lucy Authié ancre sa réflexion sur le design responsable en développant un projet professionnel qui vise à renforcer les liens entre le luxe et le développement durable.
C’est lors de recherches sur le design durable que naît son intérêt particulier pour le mouvement de l’Upcycling. Elle a pu, au cours de son Bachelor créer, développer et fabriquer un matériau, le PAPER COMPOSITE, fabriqué à partir de papier recyclé. Particulièrement adapté au domaine de la lunetterie, ce matériau permet de proposer une alternative à l’acétate, aux plastiques et autres matériaux naturels rares utilisés dans la conception traditionnelle de lunettes.
Selon elle, l’impact humain et le savoir faire anoblissent l’objet, le procédé crée la rareté. Cette réinterprétation de la matière et de l’individu lui permet in fine de concevoir des accessoires qui créent une nouvelle identité caractérisée par un nouveau style, destiné à une nouvelle personne. Le domaine de la lunette lui semble idéal pour cela car il se situe entre l’objet fonctionnel et l’accessoire de mode.
De quelle manière la notion d’UTOPIE est-elle présente dans ta pratique, approche et/ou stratégie artistique?
Je suis sensible à la notion d’Idéal propre à l’utopie. Bien que perceptible et parfois à la limite du palpable, elle reste en mutation, en constante évolution. Elle est non-existante et en perpétuelle redéfinition.
Cette notion est omniprésente dans mon processus de création, elle me pousse à définir un nouvel imaginaire et à me renouveler sans cesse.
Cet imaginaire me libère. Il me permet de créer sans limites et sans restrictions. Je peux alors voir plus loin, dépasser le connu pour imaginer autre chose, un nouvel univers, une nouvelle vision du monde.
L’Utopie se comprend parfois comme la construction mentale d’un système ou d’un modèle idéal de société civile. Comment perçois-tu le rôle de la pratique créative dans ce contexte? Où, dit d’une autre manière, penses-tu que le design peut changer la société?
« L’utopie est la vérité de demain » Victor Hugo.
A mon sens, le rôle du créateur ne se résume pas à penser la forme et la fonction d’un objet. Je perçois le designer comme une antenne qui capte l’instant présent, les humeurs, les besoins de changement d’une société.
Chaque création est une interprétation de ce qui nous entoure ; une vision singulière, une opinion nouvelle sur le monde.
A travers le message véhiculé par sa pratique créative, le designer contribue à créer de nouveaux courants de pensées. Ces nouvelles approches encouragent un renouvellement perpétuel indispensable à toute évolution.
Il est capital pour nos sociétés de savoir se réinventer.
Pour moi, cela passe aujourd’hui par la nécessité de prendre conscience que l’impact de nos choix influe sur notre futur : du processus créatif jusque dans la manière de consommer.
Dans cette optique, j’ai nourri mes recherches de mouvements à l’image de l’Upcycling.
Le résultat en est la création d’une collection de lunettes en PAPER COMPOSITE, matériau développé à partir de papier recyclé.
« Le design ne signifie pas donner forme à un produit plus ou moins stupide, pour une industrie plus ou moins sophistiquée. Il est une façon de concevoir la vie ». Ettore Sottsass.
Où puises-tu ton inspiration? Ton travail et/ou ton état d’esprit sont-ils guidés par des références particulières?
L’Homme est au cœur de mes questionnements. Il est ma principale source d’inspiration.
Mon approche du design est assez philosophique. Je suis très sensible aux travaux de personnes tels que Jean BAUDRILLARD (La société de consommation, édition Gallimard, 1970), Hans Jonas (Le principe responsabilité. Une éthique pour la civilisation technologique, 1979), Victor PAPANEK, Design for the Real World, 1971), Michel BRAUNGART et William MCDONOUGH, Cradle to Cradle, Créer et recycler à l’infini, 2011) ou encore Ezio MANZINI (avec Carlo Arnaldo VEZZOLI, Design for Environnemental Sustainability, 2008).
Leurs regards alternatifs poussent à une remise en question aussi bien sur le Design que sur nos sociétés.
Plus sur Lucy Authié et PAPER COMPOSITE ici.
